La controverse
Cantat

Le feu aux poudres

Mai 2011. Futur patron de la Comédie (il entrera en fonction le 1er juillet 2011), Hervé Loichemol annonce la présence de Bertrand Cantat au casting du spectacle de Wajdi Mouawad qui ouvre sa première saison. Stupeur. Incompréhension. Rage. La polémique s’enflamme, dans les journaux et dans la rue.

« Bertrand Cantat a-t-il droit à l’oubli ? Peut-il légitimement remonter sur scène ? Doit-il se taire à jamais ? Faut-il redonner une chance à un meurtrier ? Quel message adresse-t-on aux jeunes ? aux femmes battues ? aux cogneurs ? »

Edito du Matin

Bertrand Cantat a-t-il droit au théâtre ?

Les pour et les contre s’affrontent par presse interposée dans les colonnes du Matin, de 24Heures, de La Tribune (dont les blogs se déchaînent) et du Temps qui résume les positions dans sa revue de presse du 12 mai. Seul Le Courrier se tient en dehors de la polémique.

« La force de ce chant ajoute au trouble d’un spectacle qui, définitivement, ne peut se soustraire au réel.  »

Lionel Chiuch, Tribune de Genève 

« Ce qui m’a heurté, c’est comment une vague d’opinion d’une brutalité phénoménale s’est créée. Beaucoup ont oublié qu’il y a une différence entre la morale et la justice. »

Wajdi Mouawad, metteur en scène


 

« Une fois que le spectacle a commencé, on passe à autre chose. Parce qu’il y a une cohérence. Mais j’ai vu la trilogie avec Bertrand Cantat à Bordeaux et à Avignon sans lui. Et c’est sûr qu’il vaut mieux qu’il soit là. »

Hervé Loichemol

« Pas l’ombre d’une banderole ou l’écho d’une révolte »

Mi-octobre. La première représentation se passe dans le calme.

« Devant la bâtisse, quelques étudiants du Conservatoire, des quadragénaires férus de théâtre, mais surtout des passionnés de l’univers de Wajdi Mouawad. Si la pièce se jouait à guichets fermés, seuls les fans du chanteur et ses détracteurs n’avaient, semble-t-il pas jugé opportun de faire le déplacement », note Le Matin. 

« Nous n’avons jamais eu peur que la soirée se déroule mal. C’est un public de théâtre qui est venu voir une œuvre de théâtre. »

 Christine Ferrier

« A la sortie, on philosophe, on critique, on analyse, on converse (…), témoigne Rosine Schautz du Courrier. Et peut-être qu'on médite aussi la phrase liminaire de Déjanire, qui ouvre Les Trachiniennes et inaugure la trilogie : ‘Voilà bien longtemps qu'elle est apparue aux hommes comme une évidence, cette parole qui dit que nul ne peut savoir, pour aucun mortel, avant qu'il soit mort, si sa vie lui fut propice ou funeste.’ »

Ainsi qu’en conclut Le Matin à l’issue de la première:
« la polémique sur la présence sur scène de l’ex-chanteur de Noir Désir s’est éteinte avec les lumières. »